Je m’excuse par avance de plomber l’ambiance avec
cette anecdote pas vraiment drôle pour le commun des mortels.
C’est l’histoire de quelqu’un d’organisé et de solitaire. Et comme la grande affaire de la vie, c’est la mort, il ne voulait avoir de comptes à rendre à personne au moment du grand saut. En effet, il est désagréable de dépendre des autres, y compris dans ce cas.
Bien sûr, dans les grandes lignes, on n’a besoin de personne pour mourir. Mais parfois… comment dire…, la mort est plutôt longue à venir. Il y a donc beaucoup de choses à préparer avant qu’elle ne nous embarque. Il faut, par exemple, commander un médecin, des infirmières, de la nourriture. Bon, sur ces points, on peut toujours s’organiser. C’est au moment du dernier soupir que les choses se compliquent.
En réalité, il fallait que quelqu’un le portât dans le tombeau, ce pauvre malheureux, qu’il soit cramé ou pourrisse in situ.
C’est pourquoi cet homme non moins précautionneux dormait dans son cercueil tout préparé au milieu de sa chambre. Comme ça, il ne risquait pas d’être pris au dépourvu. Une telle disposition est assez classique. Pour résumer, c’est comme pour le reste, Il faut s’y habituer et après, ça va tout seul. Il s’agit de dormir habillé, la fleur à la boutonnière, dans son dernier frac de scène tenant lieu de pyjama.
Et le couvercle se referme dès que la température corporelle baisse en dessous du point critique.
N’ayez crainte ! On peut vivre des années dans cet environnement et se réveiller chaque matin, frais comme un gardon. Il s’agit d’une précaution utile qui ne servira qu’à une seule occasion.
Le voilà donc tout content d’avoir prévu jusqu’à la fermeture de son couvercle. Symboliquement, c’était un signe très fort. Une fois le cercueil refermé, après vingt-quatre d’heures d’extinction des volets et de la lumière, les pompes funèbres, prévenues par leur bip, viendraient au domicile chercher le corps après avoir désactivé l’alarme et la serrure. Bref, juste une formalité administrative.
Hélas, mille fois hélas, une nuit, le couvercle tomba sur son corps victime d’un malaise et déjà froid, alors qu’il avait oublié d’activer l’extinction automatique de la lumière, à cause de cette manie de se mirer avant de s’endormir. Résultat : la facture d’électricité du défunt gonfla post-mortem et les huissiers, dépêchés sur place, durent appeler le médecin légiste, toutes narines bouchées.
P.M.
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