Friday, March 17, 2023

Incipits finissants (102)

 

Je sais pas si vous l’avez remarqué, depuis le temps que l’on s’échine à être édité : pour les vedettes du show-biz (politicards, footballeux, footballeuses, chanteuses, chanteurs, actrices, acteurs), la publication d’un livre constitue aussi le nec plus ultra, l’aboutissement d’une vie de succès, leur autobiographique leçon de sagesse, voire de morale, délivrée à pas mal de groupies. Ouah ! Vous vous rendez compte ! Elles, les stars des médias, et nous, les grouillots des fonds de tiroir, tombons d’accord : c’est bien ce que nous disions : être publié est ce qu’il y a de plus important dans une vie : laisser traîner sa trace dans un objet unique, même reproduit à des milliers d’exemplaires : conclure son existence en la cristallisant avec force !

J’irai même jusqu’à inférer que nous sommes plus malins que les ci-devant people : à dix-huit ans, avant d’aborder la vie active, on se doutait déjà de cette vérité. Les célébrités sont trop bêtes de s’y prendre aussi tard. Il faut pourtant reconnaître que, contrairement à nous, elles avaient mieux à faire avant pour briller plus. Du coup, faudrait sans doute qu’on les admire, au motif que les VIP se retiennent durant de longues années d’écrire, alors que c’était leur vœu le plus cher. Mais vous croyez vraiment que là était leur motivation ?

L’admirable légende se dégonfle sitôt que nous découvrons leurs œuvres. L’impression que donne la lecture de ces nombreux tomes est que les platitudes s’y succèdent comme au fil d’une armée de gros soldats de plomb.

Pourquoi ces bouquins ont-ils donc été écrits ? Ne soyons pas naïfs ! Pour faire le buzz pardi ! Pour profiter d’une gloire passagère ou enrayer un déclin télévisuel. Afin de booster une image en perte de vitesse, et donc les ventes de produits dérivés de leurs tronches, y compris quand c’est nul à l’intérieur. D’ailleurs, quelqu’un d’autre les a rédigés à leur place, ces opus.

À l’arrivée, il y a autant de différences entre une star et un poète qu’entre un cercle et un carré. Hélas, les peoples se servent du cercle (des poètes disparus ?) pour nous rouler dans la farine. Et nous, les poètes aux roues carrées, contre toute attente, peut-être avons-nous raison de vouloir écrire l’œuvre de toute une vie. Bien que l’on s’y reprenne à plusieurs fois et que peu de monde ne la lise au final.

Malgré tout, qui sait si notre volume ne parviendra pas à avoir une vraie consistance, lui ?  

P.M.

Numéro 102 de "Traction-brabant"

 

Le numéro 102 de "Traction-brabant" est vendu au prix de 3 €. Alors, ne vous privez pas. Des exemplaires des anciens numéros sont disponibles sur demande.

Pour plus de précisions, contact association le Citron Gare : p.maltaverne@orange.fr

Présentation

"TRACTION-BRABANT" (alias T-B pour les intimes) est un fanzine d'écriture, de poésie et autres textes courts, créé en janvier 2004 par Patrice MALTAVERNE (conception, écriture, choix et mise en page des textes) et Patrice VIGUES (illustrations).

"TRACTION-BRABANT" existe aussi et surtout sous sa version papier à une cent soixante-dizaine d'exemplaires par numéro. Le poézine est à parution aléatoire, quoique... si tous les deux trois mois, les combattants sont en forme, un nouveau numéro sort de leur tanière.

"TRACTION-BRABANT", aujourd'hui publié par l'association Le Citron Gare, ne demande aucune subvention, le poézine a juste pour but de faire circuler à son modeste niveau une poésie pas trop classique ni trop molle surtout, ainsi que de véhiculer certaines pistes de réflexion, sans pour autant qu'il ne soit tranché dans le vif.

Plus précisément, à l'origine, TRACTION-BRABANT est la contraction de traction avant, l'auto et de brabant double, la charrue à double soc. Cela montre avant tout notre nostalgie pour ces vieux objets mécaniques ainsi que notre méfiance par rapport à un progrès non mesuré...

Les auteurs (poètes, illustrateurs) présents dans "TRACTION-BRABANT" sont plus de cinq cents, d'après les dernières stats.

Ce blog a pour but de reproduire des extraits du zine sous sa version papier et de faire connaître davantage ce que nous faisons....

"TRACTION-BRABANT" s'efforce d'encourager ses participants à des échanges de textes et d'idées et pourquoi pas à de possibles rencontres.

S'il vous plait, n'envoyez jamais plus de 10 pages format A4 (en un seul fichier et format Open office ou Word, de préférence) si vous contactez le poézine. 

À l'inverse, jusqu'à preuve du contraire, et contrairement à la majorité des revues de poésie d'aujourd'hui, aucune thématique n'est imposée dans "TRACTION-BRABANT". C'est la liberté chère au poète (du moins, je le crois) qui prime, et puis aussi, cette certitude que le poète peut trouver lui-même de quoi il a envie de parler quand il écrit…

P.M.

Contact pour l'association Le Citron Gare : p.maltaverne@orange.fr

Perdus de luxe


De Philippe Labaune (extrait de T-B 79)


Yeux de Sonia


Où glissent ses yeux ?

Sonia ferme la porte
Trace
Chaleur de sa main sur le métal de la poignée.

Éclairez la lampe de chevet, Sonia, s’il vous plaît.

Sonia est dans la chambre
Écrin du bustier noir
Corps flexible et frémissant.
Rondeur des fesses dans la pénombre
Sonia n’a pas de culotte.

Ne me regardez pas, Sonia, s’il vous plaît.

Sonia est assise au bord du lit
Aucun mouvement dans la douce lumière du soir
Seul le rythme de sa respiration
Tout est très calme
Elle bouge à peine.

Installez-vous au milieu du lit, Sonia, restez assise.

Tension du bras, courbure de l’épaule
Où glissent ses yeux ?
En équilibre
Entre le haut et le bas
Entre l’avant et l’arrière
Equilibre parfait et pourtant fragile
d’une perle.

Sonia, glissez la bretelle le long de votre bras, s’il vous plaît.

Ouverture sur le côté
Le flanc
Cela baille et révèle
Ne pas toucher
Un sein autour duquel le monde pivote
L’axe d’un
téton
Tout tourne
Et s’amplifie
L’univers en expansion autour de la pointe d’un sein
Le sein de Sonia

S’il vous plaît Sonia, chantonnez un air ancien et amoureux
La vie en rose
Chantonnez la vie en rose
Doucement
Timidement
Sonia
S’il vous plaît.

Sonia pose la tête dans le creux de son épaule le menton fine
pointe du visage si finement taillé
Ciselé
Les lèvres de Sonia une
ligne délicate sur le galbe de l’épaule une
possible humidité
La gorge vibre du chant hésitant retenu
La nuit remue de cette tension infime
Les plis du monde, du bustier et du corps
Je voudrais voir la pointe de votre langue,
Sonia,
S’il vous plait,
Sur votre épaule,
Votre langue
Faites la glisser
Goûtez

La langue de Sonia
Si petite
La langue de Sonia au bord de ses lèvres
La pointe de la langue de Sonia
sur le galbe de son bras
C’est presque invisible
Ne se voit pas
C’est comme si on entendait
Le chant du corps de Sonia
sous sa langue.

Sonia se donne à voir
entre tristesse et abandon
entre la joie et la peine
Une femme en équilibre
qui suspend le monde autour de son cou
C’est une liane dans le vent du soir
une madone secrète et dénudée

Où glissent vos yeux ?

Attrape-rêves de Perle Vallens

 "Attrape-rêves" est le blog de Perle Vallens.

Plutôt épurée (dominante de noir et blanc), cette publication donne à lire des poèmes écrits d'après des photos qui sont autant de blasons, ces poèmes du 16e siècle écrits sur une partie du corps, même quand ce n'est pas de parties du corps dont il s'agit.

En effet, cette fidélité à leur sujet est l'une des caractéristiques de ces textes qui, dans leur diversité formelle (proses, mais également poèmes en vers libres), sont tenus serrés par un classicisme élégant.

À retrouver également dans "Attrape-rêves", des textes caviardés en noir pour en faire ressortir un poème et quelques ciné-poèmes (vidéos à regarder sur Youtube).

A lire "Attrape-rêves", vous avez déjà ce que vous risquez : c'est ici pour y entrer.

Portrait d'homme politique, de Patrice VIGUES


Malta compil 2011 : "Femme-enfant" (avec Windows media player)

Pour continuer la suite de la Malta compil, cuvée 2011, un extrait de "La partie riante des affreux", recueil écrit avec la complicité de Fabrice Marzuolo, publié aux éditions Le Citron gare par votre serviteur.

Le poème qui suit est intitulé "Femme sous-marine". Vous pourrez l'entendre ici (avec un titre de Synopsis intitulé "Superwave" et importé via Dogmazic, site de musique sous licence libre, https://www.dogmazic.net/), le texte étant reproduit ci-dessous :

Son maquillage épais lui est resté de toutes ces années passées dans la submersion subversion. Elle n’a pas eu beaucoup le choix. Son sous-marin n’était pas jaune il tirait sur le bleu pétrole. Voilà d’où venait l’angoisse. Cette femme a perdu du temps à rester seule. Très vite, il est apparu pour les déjà parents qu’elle avait passé son tour, cette gourde. Pourtant, elle n’était pas plus moche qu’une autre. Elle n’avait pas un seul membre qui lui manquait, pas de bielle qui était tombée sur la voie publique au cours du transport. Et en plus d’être fille unique, elle n’avait pu se faire inséminer restant sèche comme un taille-haie. Et cette harpie se permettait d’enseigner les bonnes manières aux enfants des homais O mais alors ! Pour trouver un peu d’humilité humidité elle dut partir faire de la plongée au fond de l’océan avec les oursins d’apothicaire. Comme ça les oreilles bouchées elle n’entendrait plus les bonnes mères qui lui lubrifiaient ses conduits auditifs à coups de langues mielleuses tout en répétant que son ventre était cimenté. Mais maintenant elle touchait au but. Elle allait ressortir sur la plage. Les autres lui foutraient la paix. Ces mémés lui pardonneraient le fait de n’avoir pas aimé les bébés et de n’avoir pas partagé sa laitance avec quiconque. Elle était presque morte comme après un marathon en apesanteur.

De Thibault Marthouret (extrait de T-B 30-31)

« un requin qui fumait plus a rallumé son clope », faut voir le résultat

Dans ton feu de joie tu as jeté
du miel,
l’Asie,
ce qui coule aux et des oreilles,
le jaune, l’orangé, l’ambré,
des cordes électriques,
des pétards en gelée qui explosent en brûlant,
nous aspergent,
nous rendent moins transparents,
des étincelles qui goûtent nos peaux puis s’en retournent aux
flammes,
des géants de papier mâché,
un kilo cinq de viande hachée,
des fringales,
des déserts,
faut voir la hauteur du brasier,
la félicité, balancée entre deux mouchoirs, en est le poumon
expirant son air chaud, rougissant nos prunelles écarquillées,
des pense-bêtes noircis de rendez-vous à ne pas manquer
auxquels quelqu’un devra bien se rendre à ta place,
tes lettres à ceux partis sans laisser d’adresse,
un plein container scellé,
des plaies salées,
des bidons d’eau de mer,
des nuits empaquetées,
faut voir comme prennent les flammes opaques,
comme elles attirent phalènes et loups prudents,
humains échaudés,
au feu ta panoplie de gynéco pour héros à guitares,
les femmes ensommeillées qui se réveilleront sous la cendre,
le ciel terne de ton absence,
au feu deux, trois œdèmes,
un âne aux ailes coupées,
des pertes de vue,
des brochures pour week-ends avortés,
faut voir ce que consument le white spirit et l’esprit saint sainement dosés,
ta verve chimique ici ou là versée,
l’appétit flamboyant que nourrit ton décès
autour duquel nous nous retrouvons, bêtes,
ton brasier sur les bras,
fixés par les yeux noirs des géants calcinés,
ignorant tout du mode d’emploi,
du bois dont tu te repais,
du secret de ton combustible dont la formule roussit dans la fournaise.
Ne sachant rien, nous attendons,
notre cercle un hommage et une peur grégaire,
ton feu l’ultime célébration de la lumière.
Personne n’ose sauter par-dessus les braises,
le diable a peur de danser,
il réclame un sabbat dans le respect des règles.

"Gravure n°7 pour métropole", image de Pierre Vella et en son hommage

 

De Gaël Guillarme (extrait de T-B 81)

Notre visage n’est jamais tout à fait le nôtre
mais aussi en large part celui des autres
qu’ils traversent par droit d’usage
vers eux-mêmes ou de plus proches paysages

On voudrait qu’une fois un regard s’attarde
plus longtemps que le temps d’aimer pour qu’il garde
quelque chose de nous et nous prête vie
plus tard si nous en avions perdu l’envie

Tu restes seul Il n’est pas de pire déclassement
parmi les hommes que ce renoncement au protocole
communément admis de l’émerveillement
devant la beauté de la vie et ses vestiges de nécropole

Tu pourrais partir et rejoindre au loin cette île
pour qu’enfin l’eau se montrât dans la transparence
de ces ciels plus proches des plateaux de transhumance
où se disent aussi la blancheur de la feuille et le désir inutile

Tu pourrais boire à l’eau de cette rivière
sise au bord d’une prairie à l’herbe si fluide
dans le vent que ton corps devenu lui-même liquide
accepterait enfin de creuser son lit dans la terre

Tu découvrirais peut-être une nouvelle façon d’aimer
dans la belle de nuit qui fuit l’étreinte de la lumière
et au baiser arraché d’un soleil éreintant préfère
pour s’offrir toute la distance de l’obscurité

Mais tu restes sachant ce qui aura le dernier mot
et quel sera ce mot noyauté de silence
et quel sera ton silence dans ce dernier soubresaut
de poisson dans l’œil duquel entre tout un ciel immense

Mais tu attends cependant qu’à l’ennui de la cime
ne répond seul en toi que l’écho de l’abîme
Dressé sur la plaine des hommes couchés
tu rejoins lentement le reflet de ton horizontalité

Sirène rouge de Cathy Garcia


Et pour en savoir plus sur les illustrations, la revue et les textes de Cathy Garcia, je vous propose de leur rendre visite :

Traction-brabant 99

J'ai souvent entendu ça : quand il écrit, le poète se méfie du « je » comme de la peste ! Ces précautions d’auteur ressortent lors de nombreux d’entretiens que je lis en revues depuis des années. Il s’agit aussi d’un conseil volontiers prodigué aux auteurs en herbe.

Bref, ce rejet du « je » me semble être une constante du poète pudique qui n’aime pas constater que l’égo prend toute la place dans ses vers, surtout s’il est d’un naturel discret.

Dur dur de reconnaître, en effet, que la réserve s’envole lorsque les freins de l’écriture lâchent et qu’en réalité, le moi reprend le dessus. Cet aveu sonne comme une faiblesse impardonnable.

Lorsque je relis certains de mes poèmes, le « je » m’énerve effectivement, même si ce « je » n’est pas toujours moi : Avouez-le, créer un « je » de toutes pièces, c’est le sommet de la perversité. Comme s’il n’y en avait pas déjà assez comme ça ! En voilà une méthode commode pour rentrer dans la peau d’un personnage, devenir un héros lorsqu’on n’en est pas un !

Alors, quand toute cette comédie me tape sur le système, j’ai ma combine : elle n’est pas miraculeuse ! Au lieu d’écrire « je », j’écris « il », ou bien « elle », ou bien « tu », ou bien « vous » ! Ou encore mieux, j’ai recours à la tournure impersonnelle : bref, tout ça, les poètes savent le faire.

Malgré tout, quelque chose me gêne dans cette défiance. Si j’en reviens à ces entretiens du début, lorsque l’auteur interrogé affirme ses réserves vis-à-vis du je, il dit texto : « Je me méfie du je ». Du coup, le « je » qui a disparu de la surface des mots en profite pour surgir dans la réalité.

Par conséquent, ça ne sert pas à grand-chose cette chasse à soi-même ! C’est dans la vie qu’il faudrait le fuir, le « je » !

Si l’enseigne (l’écriture) est belle, mais que l’accueil (l’humain) est nul, la révolution induite par l’écriture n’est pas énorme. À ce compte-là, pas de fausse pudeur ! Vous pouvez laisser le « je » dans vos poèmes. Plutôt que de vous prendre la tête avec ces coquetteries, posez-vous des questions sur votre humanité ! La réflexion sera plus utile ! Même si, à trop confondre œuvre et homme, cette ambition finit par être démesurée !

P.M.

J'écris pas (poésie accidentelle) de Pénélope Corps

Comme Pénélope Corps intitule joliment son blog : "J'écris pas" : eh bien c'est très bien. Continue comme ça. Car la poésie devrait être le lieu de toutes les libertés qu'on n'a pas ailleurs.

Conséquence directe de la première affirmation : la poésie est accidentelle. Ah oui c'est vrai j'avais oublié : des fois, toujours, la poésie n'est pas accidentelle. Eh bien moi je trouve que c'est dommage.
Car pour moi, "Poésie accidentelle", ça ne veut pas dire poésie ratée mais que la poésie peut venir de n'importe où : du quotidien et de son réalisme. C'est bien le cas ici. Du coup, attention : dans une poésie accidentelle, il peut y avoir beaucoup de morts. Mais c'est la réalité, non ?

"Poésie accidentelle", ça signifie aussi que la poésie peut partir très vite. Dans ce cas-là, ne jamais chercher à la rattraper ! C'est beaucoup mieux comme ça. Celle-ci s'est barrée de son blog en 2018. Tant pis, elle reviendra bien un jour, ici ou ailleurs.


Traction-brabant 57

Ils ont bien de la chance, certains de mes amis poètes, de savoir quelle est la poésie qu’il nous faut, à nous autres, habitants de l’univers.
Car, me concernant, parvenu à la quarantaine, mes certitudes sur le sujet semblent s’obscurcir régulièrement.
Et à force d’attendre des solutions à tous mes problèmes, ici comme ailleurs, je suis déçu.
Pourtant, à lire les poètes édités dans de vrais bouquins, je me dis que leurs œuvres souvent se ressemblent.
Du coup, j’en tire la conséquence, toute bête, que c’est comme ça qu’il faut écrire. Avec ce petit dégagement du moi je fais pas de la poésie mais je sais que c’est de la poésie et je suis un poète qui veut pas que ça se sache trop parce que c’est un peu la honte : vous pouvez jouer au même jeu en remplaçant les poèmes par une jupe courte.
Oui, c’est assez déplaisant cette attitude hypocrite qui suinte de l’écriture : car nous le savons bien que vous êtes des bons poètes, alors jouez pas aux précieuses ridicules !
Faut dire que, malgré ces œuvres calibrées, les déclarations des poètes sur le sens du mot poésie sont autant contradictoires que péremptoires :
Alors, il y en a qui disent que la poésie ne doit pas recéler d’images mais qu’elle doit creuser le langage, ou bien qu’elle doit être marrante, ou encore que la philosophie est un plus pour la poésie, d’autres qui prétendent que cette dernière doit être incompréhensible quand leurs adversaires défendent une poésie facile à comprendre, la plupart, enfin, qui se détournent avec dégoût de toute poésie engagée lorsque quelques uns en rêvent.
Moi, au milieu de tout ça, j’en perds mon latin. Et si toutes ces définitions intangibles n’étaient que le reflet des goûts personnels des auteurs de ces déclarations ? Leurs modèles doivent donc être leurs poèmes.
Si ça ne tenait qu’à moi, il y a longtemps que je ferais en sorte d’entreposer toutes les poésies possibles et imaginables dans le garage de la Traction-brabant, sans hiérarchie entre elles. Et sans me soucier par exemple de savoir si c’est branché ou débranché.
Hélas, les professeurs tiennent haut la barre, et la tiendront toujours. Pauvre de moi, je ne suis pas un mec assez solennel, et certains des copains ici présents pas davantage, pour que nous soyons reconnus comme des poètes inconnus dans cette société qui a peut-être raison de se foutre de nous, trop sûrs de la valeur de nos textes, malgré les apparences, pour pouvoir intéresser les autres.    P.M.

D'Evelyne Charasse (extrait de T-B 60)

Nul peintre
Jamais
Ne pourra
Poser sur la
Toile
Le bleu du
Ciel
Quand on est
Heureux
_

La pluie
Rigole
Déborde des gouttières
Joyeuse sorcière
Elle chante
Bruyamment
Transforme
Les tuiles
En de brillantes
Écailles
_

Dans les
Coulisses
Derrière le
Rideau rouge
Sang
Décider
De couper
Les fils
_


Je me bricole
Une
Démarche
Légère
Plume d’oie
Sauvage


 (quelques micropoésies)

Tuesday, March 14, 2023

Le site de Philippe Jaffeux

D'ordinaire, je n'aime pas forcément les sites consacrés à un seul auteur (et pas aux autres, bien qu'ils existent).

Mais là, il faut reconnaître que celui de Philippe Jaffeux est une création hors normes.

Et le visiteur n'est pas volé en ce qui concerne les textes.

La majeure partie de ces derniers appartiennent à une même oeuvre, Alphabet, un texte tentaculaire et qui peut être qualifié d'immense, puisque chaque lettre (de A à M) recèle après clic un fichier de 28 pages bien serrées avec des mises en page à chaque fois différentes.

Un travail sobre mais très efficace qui permettra de vous faire découvrir une oeuvre originale et résolument moderne, axée finalement sur le langage, dont j'ai publié à deux reprises de courts extraits (numéros 38 et 41 de Traction-brabant), à l'instar de plusieurs autres revues.

Pour y aller, c'est ici !

Wednesday, March 08, 2023

De Myriam Goulette (extrait de T-B 102)

les étoiles sont éteintes
le cœur a ralenti sa course
le temps lui-même a arrêté de compter

au même moment sur une autre planète
à deux pas de côté
à deux souffles de brouillard

des gens courent et crient
eux éveillés
c’est pourquoi sans doute
je rature le carnet

Thursday, March 02, 2023

Autour la nuit de Jean-Jacques Marimbert

Avec "Autour la nuit", blog de Jean-Jacques Marimbert, je vous présente de la belle ouvrage. C'est très littéraire, certes (ce n'est pas une poésie d'action qui fait du rentre-dedans), mais ça fait du bien de lire quelque chose de bien écrit, de tissé dans le détail.

Ces paysages sont peut-être des tableaux, mais ils ne sont pas vagues, pas victimes de l'imprécision d'une abstraction.

Et les vers n'ont pas besoin d'être rimés ici pour ressembler à des vers.

"Autour la nuit", mais peut-être aussi le jour, c'est ici.

Incipits finissants (102)

  Je sais pas si vous l’avez remarqué, depuis le temps que l’on s’échine à être édité : pour les vedettes du show-biz (politicards, football...