Friday, September 29, 2023

Traction-brabant 105

Pour être modernes, les poètes contemporains emploient des phrases simples qu'ils répètent dans tous les sens. Les phrases simples répétées par les poètes modernes n’ont pas de but mystérieux. Elles amusent les gens qui les écoutent, rentrent facilement dans leurs têtes, et améliorent la réputation de la poésie contemporaine, à laquelle les gens reprochent d’être trop compliquée depuis Rimbaud. Les phrases simples employées par les poètes contemporains sont effectivement trouvées simples par les gens qui les écoutent. En plus, les gens rigolent quand ils entendent les phrases faciles des poètes modernes. Ils ne peinent pas à comprendre les poètes d’aujourd’hui qui passent pour encore plus modernes qu’ils sont. Les phrases simples des poètes modernes n’ont que des avantages. En plus d’être comprises par les gens qui les écoutent et de les faire rigoler, elles demandent moins d’imagination de la part du poète contemporain qui se permet d’écrire un minimum de choses faciles pour occuper davantage de place sur la page. Les phrases simples des poètes modernes peuvent être dites et entendues par toutes sortes de personnes, elles n’ont plus besoin d’être toujours écrites. C’est la dernière invention véritable des poètes d’aujourd’hui : écrire des phrases simples et modernes qui sont intégrées par les gens, les font rigoler, tout en ne nécessitant plus d’être écrites sur du papier. Les phrases faciles écrites par les poètes contemporains sont conçues pour être dites dans un espace destiné à les accueillir, ou pour être enregistrées sur tout dispositif sonore adéquat, histoire de faire rigoler les gens et d’être comprises par un maximum de personnes qui sauront qu’ils ont affaire à un poète moderne. Or, si vous trouvez ces phrases claires et modernes, vous achèterez mes livres et donc, je vous autoriserai à dire de moi que je suis bien sympa mais que je débloque un peu de la cafetière, à rabâcher tout le temps des trucs faciles, modernes et compréhensibles, à l’instar des autres poètes contemporains particulièrement fiers d’être modernes lorsqu’ils répètent les mêmes trucs à longueur d’année.            
                                                                                                                 P.M.

Numéro 105 de "Traction-brabant"


Le numéro 105 de "Traction-brabant" est vendu au prix de 3 €. Alors, ne vous privez pas. Des exemplaires des anciens numéros sont également disponibles sur demande.

Pour plus de précisions, contact association le Citron Gare : p.maltaverne@orange.fr

Présentation

"TRACTION-BRABANT" (alias T-B pour les intimes) est un fanzine d'écriture, de poésie et autres textes courts, créé en janvier 2004 par Patrice MALTAVERNE (conception, écriture, choix et mise en page des textes) et Patrice VIGUES (illustrations).

"TRACTION-BRABANT" existe aussi et surtout sous sa version papier à une cent soixante-dizaine d'exemplaires par numéro. Le poézine est à parution aléatoire, quoique... si tous les deux trois mois, les combattants sont en forme, un nouveau numéro sort de leur tanière.

"TRACTION-BRABANT", aujourd'hui publié par l'association Le Citron Gare, ne demande aucune subvention, le poézine a juste pour but de faire circuler à son modeste niveau une poésie pas trop classique ni trop molle surtout, ainsi que de véhiculer certaines pistes de réflexion, sans pour autant qu'il ne soit tranché dans le vif.

Plus précisément, à l'origine, TRACTION-BRABANT est la contraction de traction avant, l'auto et de brabant double, la charrue à double soc. Cela montre avant tout notre nostalgie pour ces vieux objets mécaniques ainsi que notre méfiance par rapport à un progrès non mesuré...

Les auteurs (poètes, illustrateurs) présents dans "TRACTION-BRABANT" sont plus de cinq cents, d'après les dernières stats.

Ce blog a pour but de reproduire des extraits du zine sous sa version papier et de faire connaître davantage ce que nous faisons....

"TRACTION-BRABANT" s'efforce d'encourager ses participants à des échanges de textes et d'idées et pourquoi pas à de possibles rencontres.

S'il vous plait, n'envoyez jamais plus de 10 pages format A4 (en un seul fichier et format Open office ou Word, de préférence) si vous contactez le poézine. 

À l'inverse, jusqu'à preuve du contraire, et contrairement à la majorité des revues de poésie d'aujourd'hui, aucune thématique n'est imposée dans "TRACTION-BRABANT". C'est la liberté chère au poète (du moins, je le crois) qui prime, et puis aussi, cette certitude que le poète peut trouver lui-même de quoi il a envie de parler quand il écrit…

P.M.

Contact pour l'association Le Citron Gare : p.maltaverne@orange.fr

Encore un peu de temps et nous serons tous à la rue


Arts vifs et poésie de Tristan Felix

Sous-titré "Ouvroir de poésie sauvage et magique", le site de Tristan Felix s'appelle "Arts vifs et poésie". Avec tous ses mots, on va pas être déçu du voyage. Et de fait, ce site est très dense, vraiment, avec des extraits de textes, mais aussi toute la palette audio et vidéo possible : dessin, photographie, mais également radio et interview.

"Arts vifs et poésie", plus particulièrement, renvoient aux performances de clowns ("Gove de Crustace") de Tristan Felix, ainsi qu'au "Petit théâtre des pendus". Délires garantis !

C'est ici, les crustacés pendus !

Hélicoléoptère de Patrice VIGUES


 

Malta compil 2019 : "Un drame au Mexique" (avec lecteur mp3)

L'année 2019, c'est l'année de mon hommage en poèmes à Jules Verne, avec "Jeunes et vivants". Ce texte a été publié une première fois en intégralité sous format numérique par Poézibao: https://poezibao.typepad.com/poezibao/2020/06/feuilleton-jeunes-et-vivants-de-patrice-maltaverne-111.html
Puis une seconde fois, sous format papier, dans une version légèrement modifiée, par les Editions de l'Alisier blanc : http://www.lalisierblanc.com/crbst_14.html

Ci-après, extrait de ce recueil, le poème intitulé "Un drame au Mexique" :

Les héros fuient toujours à ce moment-là
L'amour est maximal s'ils se font rattraper
C'est normal ils sont des héros mal payés
Pour ça toujours beaux forcément sveltes
Sans ennui de la souffrance on les reconnait
À un panache factice ils ne se feront jamais
D'illusions ne se poseront pas de questions
Car les rêves sentant les plaintes ne fuient
Jamais assez vite des crânes Dommage ils
Ne sont plus des héros ce jour-là les héros
Ne l'étaient pas au début de l'histoire ainsi
Leur fuite ne semble pas une fuite positive
Ils jouent les gars confiants en eux-mêmes
En leur honte ils n'ajoutent aucune saveur
À la fuite ils doivent rejoindre sur la côte
Une bagnole non un bateau une histoire
De convoyage de meuble et donc ils n'ont
Pas trop de temps il se trouve aussi qu'ils
Sont poursuivis par d'autres personnages
Au début ils avancent à fond la caisse droit
Devant il y a un chef comme bien entendu
leur équipée fonctionne sauf que la haine
Et non la joie donne des jambes à une étape
La côte devant eux est éternelle du coup eux
Ont tendance à chercher d'autres issues sur 
Lesquelles hésiter car la température devient
Froide et la végétation nulle près du sommet
Des crasses jonchent le sol sans qu'on sache
Lesquelles mirages peut-être en tout cas ils
Perdent courage surtout l'un d'eux et l'autre
Est fou happé par des fantômes au Mexique

Pour écouter le fichier audio de ce poème, c'est ici, avec la musique de Blacksquare : "I Need House", en téléchargement libre sur le site Dogmazic : https://www.dogmazic.net/

D'Antoine Bertot (extrait de T-B 87)


De l'extérieur du bois, je regarde s'extraire l'étrange nuage du châtaignier – un souffle d'air jaune se détourne de mes yeux : son dos voûté pourtant s'élève. Il suffit de peu – une respiration, un tremblement de main – et la tension s'inverse. En poussières, regarde ce qui reste au pied de l'arbre : cela finit de voler – l'air cesse de porter. Parfois se trace un visage incertain. Le profil droit s'effondre comme creusé. Blessure, face béante. Afin de célébrer son manque, elle expose quelques semaines son maintien lumineux. Souviens-toi, la couleur se fragmente, figure d'autres corps. À la fin d'un jour terne, le jaune cassé des fleurs me rappelle l'haleine d'une fenêtre. Sa lampe projette au dehors une zone claire – la nuit alors un mur percé.

Image de Pierre Vella et en son hommage


De Marie Alcance (extrait de T-B 88)

Le ciel bleu a poussé sur la route
une éolienne -
puissante dans le vent, elle
attire,
soupèse,
soulage les confidences

et tourne,
emporte,
et dissout
ce qui veut se figer au-dedans.

C’est ainsi maintenant: je rêve à ceux qui s’attardent au ciel doux,
ceux dont au fond du regard je devine
une éolienne qui va,
blanche et légère au-dessus de sa ligne de peine.

Nobodylovesme de Cathy Garcia


Et pour en savoir plus sur les illustrations, la revue et les textes de Cathy Garcia, je vous propose de leur rendre visite :

http://cathygarcia.hautetfort.com/
http://gribouglyphesdecathygarcia.wordpress.com/
http://delitdepoesie.hautetfort.com/
http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com/
http://imagesducausse.hautetfort.com/
http://ledecompresseuratelierpictopoetiquedecathygarcia.hautetfort.com/
http://associationeditionsnouveauxdelits.hautetfort.com/

De Jean-Yves Bourgain (extrait de T-B 72)

La vraie vie

La vraie vie n’est ni la propriété ni la liberté ni la ponctualité. Ni la sécurité sociale ni le système scolaire ni l’appareil judiciaire. Ni le PIB ni le niveau d’instruction ni l’espérance de vie. Ni la politique ni la culture ni la religion. Ni internet ni la télévision ni l’électricité.

La vraie vie ne peut être ni définie ni encadrée ni réglementée ni contrôlée ni prévue ni aménagée.

La vraie vie est un souffle, un élan, un torrent. Un tsunami d’événements contre lesquels le Conseil de sécurité de l’ONU, Daech et la bombe atomique ne peuvent absolument rien.

La vraie vie fait naître les nourrissons et pousser les fleurs, elle déplace les nuages, inspire des mélodies aux uns et de l’amour aux autres, elle détruit tout en un clin d’œil et reconstruit le double encore plus rapidement.

La vraie vie ne s’arrête pas. Elle n’est pas à la mode. Elle n’a aucun diplôme ni aucun papier d’identité, elle n’a ni nom, ni âge, ni statut social.

La vraie vie fait rire et pleurer, elle donne faim et soif, elle fait couler le sang dans les veines et clapoter les ruisseaux entre les rochers.

La vraie vie est dans un sourire, dans un baiser, dans un échange sincère. Elle se fout des codes, des titres, des règlements, des grands hommes et de l’histoire. Elle se joue des frontières, des prisons, des clôtures et des contrats.
La vraie vie transforme les pires moments en meilleurs souvenirs, elle provoque les rencontres et scelle les amitiés. Elle maintient en vie les mourants et foudroie les plus vigoureux dans la force de l’âge.

La vraie vie donne des frissons, des émotions, des picotements dans le ventre. Elle n’attend pas que ce soit le bon moment pour faire ce qu’elle veut. Quand elle a envie de changer le cours d’une vie, elle n’a qu’à claquer des doigts et rien ni personne ne pourra rien y faire.

Coule, avance, dévale la pente, toi, la vraie vie. Précipite-toi vers ta destination, précipite-moi dans le sens que tu as choisi de choisir. Change d’avis mille fois. Piétine-moi, écrase toutes mes tentatives de te nommer, de t’étudier, de te faire connaître. Efface ma mémoire, saccage mon quotidien, fais de moi ce que tu veux.

Fais-moi comprendre encore des millions de fois que je n’existe pas, que Jean-Yves n’est qu’un vêtement, une fleur bientôt fanée, une vague insignifiante qui finira bien par s’échouer sur la plage, un jour ou l’autre. Fais-moi sentir que la table, la pluie, l’écran en face de moi ne sont pas distincts de tout ce que je crois pouvoir enfermer dans mon hypothétique individualité.

Balaye mes certitudes. Déshonore-moi, fous-moi la honte à chaque fois que je t’oublierai, à chaque fois que je te confondrai avec tout ce que tu animes, toutes ces illusions qui prennent des faux airs d’importance capitale.

Sers-moi un verre d’eau fraîche.

"Maison interstitielle" (illustration de Jean-Marc Couvé)



Le blog de Marie-Florence Ehret

L'ancien blog de Marie-Florence Ehret, s'il est effectivement ancien (plus d'une dizaine d'années), a l'avantage de présenter plusieurs textes en ligne, tout en n'étant pas pollué par les pubs…

Vous y retrouverez un portrait complet de l'autrice : publications, enregistrements audio, mais également nouvelles, poèmes et quelques textes théoriques qui disent de manière simple comment on peut venir à l'écriture. Une passion pas plus mauvaise qu'une autre !...

C'est ici, et sans chichis.

Le site de Catherine Andrieu

Le site de Catherine Andrieu vient d'être refondu. Du coup, j'en profité pour en dire quelques mots.

Vous y trouverez pas mal de choses : présentation de ses livres, mais également images, lectures en vidéo.

Un résumé complet de l'œuvre de cette créatrice sensible à retrouver ici.


Saturday, September 23, 2023

De Gérard Leyzieux (extrait de T-B 94)

 

Le soleil ne s’est pas levé ce matin
Les oiseaux étourdis et déboussolés se sont tus
Le soleil ne s’est pas levé mais la nuit pourtant s’est enfuie
Les gens tout alentour s’interrogent
Petit à petit ils entrent dans leur quotidien
Mélange de clarté nocturne, de chaleur froide
Le soleil et la lune se sont éclipsés nous laissant seuls
Le soleil est resté couché auprès de la lune
La rosée du matin abreuve les conversations du jardin
La musique du silence flotte sur la campagne
Où toute activité se déroule au ralenti
Alors que ta respiration s’accorde à la quiétude des sens
Le soleil ne s’est pas levé ce matin
Mais, porté par tes pensées, tu ne le remarques pas
Tout en toi est radieux et heureux
La vie s’accomplit dans sa totalité
Elle te promène dans ses interstices
Là où tout se conjoint et se disjoint à la fois
Le soleil ne s’est pas levé pour tout le monde ce matin
 

Incipits finissants (102)

 

Je sais pas si vous l’avez remarqué, depuis le temps que l’on s’échine à être édité : pour les vedettes du show-biz (politicards, footballeux, footballeuses, chanteuses, chanteurs, actrices, acteurs), la publication d’un livre constitue aussi le nec plus ultra, l’aboutissement d’une vie de succès, leur autobiographique leçon de sagesse, voire de morale, délivrée à pas mal de groupies. Ouah ! Vous vous rendez compte ! Elles, les stars des médias, et nous, les grouillots des fonds de tiroir, tombons d’accord : c’est bien ce que nous disions : être publié est ce qu’il y a de plus important dans une vie : laisser traîner sa trace dans un objet unique, même reproduit à des milliers d’exemplaires : conclure son existence en la cristallisant avec force !

J’irai même jusqu’à inférer que nous sommes plus malins que les ci-devant people : à dix-huit ans, avant d’aborder la vie active, on se doutait déjà de cette vérité. Les célébrités sont trop bêtes de s’y prendre aussi tard. Il faut pourtant reconnaître que, contrairement à nous, elles avaient mieux à faire avant pour briller plus. Du coup, faudrait sans doute qu’on les admire, au motif que les VIP se retiennent durant de longues années d’écrire, alors que c’était leur vœu le plus cher. Mais vous croyez vraiment que là était leur motivation ?

L’admirable légende se dégonfle sitôt que nous découvrons leurs œuvres. L’impression que donne la lecture de ces nombreux tomes est que les platitudes s’y succèdent comme au fil d’une armée de gros soldats de plomb.

Pourquoi ces bouquins ont-ils donc été écrits ? Ne soyons pas naïfs ! Pour faire le buzz pardi ! Pour profiter d’une gloire passagère ou enrayer un déclin télévisuel. Afin de booster une image en perte de vitesse, et donc les ventes de produits dérivés de leurs tronches, y compris quand c’est nul à l’intérieur. D’ailleurs, quelqu’un d’autre les a rédigés à leur place, ces opus.

À l’arrivée, il y a autant de différences entre une star et un poète qu’entre un cercle et un carré. Hélas, les peoples se servent du cercle (des poètes disparus ?) pour nous rouler dans la farine. Et nous, les poètes aux roues carrées, contre toute attente, peut-être avons-nous raison de vouloir écrire l’œuvre de toute une vie. Bien que l’on s’y reprenne à plusieurs fois et que peu de monde ne la lise au final.

Malgré tout, qui sait si notre volume ne parviendra pas à avoir une vraie consistance, lui ?  

P.M.

Wednesday, September 20, 2023

De Hervé Merlot (extrait de T-B 35)

Souris verte

Et quand tu remets
ça
minou imberbe

je dis
qu'il y a là
un écosystème

dont finalement
on entend peu parler

dans nos tribunes
pourtant si loquaces

au sujet
de la préservation
de la nature

(extrait de "Are you ready, hank ?")

Sunday, September 17, 2023

Traction-brabant 100

Nous y voilà. Je n’y ai jamais cru et m’en suis même foutu jusqu’au numéro 90. 100 numéros de « Traction-brabant » comme 100 ans, c’est trop vénérable. Quand je repense à mon état d’esprit lors de la création de T-B en 2004, il y avait de la fraicheur dans tout ça. Beaucoup de révolte. Envie d’œuvrer sans penser à l’avenir. Pas un truc de vieux. D’ailleurs, comment prétendre à quelque chose ? Le premier numéro existant à 50 exemplaires, tous photocopiés, les illustrations collées sur la maquette. Puis T-B a continué d’exister, sans que j’y réfléchisse longtemps, se perfectionnant au fil des années. Participation aux frais à partir du numéro 15 (décembre 2006), fin des copies après le n°28 (mars 2009), idem avec le papier calque, remplacé par une couverture couleur à compter du numéro 55 (janvier 2014) et enfin, abandon de l’agrafage manuel après le n°89 (septembre 2020).

Mais qu’est-ce que représente aujourd’hui à mes yeux Traction-brabant ? Une publication de poésie modeste, qui respire depuis 18 ans sans subventions, sans comité de lecture et sans thème imposé. C’est sûrement grâce à toutes ces absences que T-B vit toujours... Sauf que le talon d’Achille est là. T-B ne se perpétue que grâce à mon énergie et à ma santé. Si je perds les deux, c’en sera fini de lui. Donc, je ne fais pas le malin. Histoire de vous amuser : il me semble impossible d’en sortir 200 numéros. Et je ne suis pas sûr que cela soit souhaitable. Car les choses ont évolué depuis 2004. Est-ce que la valeur d’un poézine papier est toujours avérée ? J’en suis convaincu, mais tous les lecteurs de poésie sont-ils de cet avis ? Ne croyez pas que le doute m’emporte. La passion est intacte, et les contraintes itou : manque de temps surtout, du fait d’une activité professionnelle qui va s’éterniser…

Par contre, je livre un constat lucide : si tous les autrices et auteurs se retroussaient les manches pour créer leur publication, nous serions davantage lus (par quelques-uns). Las !... depuis la création de T-B, la plupart ne semblent pas avoir pas eu cet élan, pensant que le fait de s’occuper de leurs seuls poèmes les sert mieux, ce qui n’est pas certain dans tous les cas. Et les plus intrépides se lassent. Pourtant, animer et fabriquer une revue est l’activité la plus passionnante que je connaisse. Le frisson provient de ces nouvelles écritures à découvrir… qui ne va pas de soi, et donc il s’agit à chaque fois d’une vraie surprise.   

P.M.

Monday, September 11, 2023

De Jérôme Hugounet (extrait de T-B 30-31)

Les tactiques du feu mettent les dispositifs à l’horreur
Les grands ensembles constitués après les exercices de réserve
Lançant Opération Tonnerre en ouvrant les hostilités
Les méditations guerrières se tiennent au garde-à-vous
Que Machiavel associe au bon sens qui défaille dans Babaorum

La marche au pas est cadencée par une gymnastique de l’esprit
Quand le bataillon passe la mesure sur les ponts en résonance
Tenant le fusil-mitrailleur dans la gâchette du destin
Qui montre la grande parade des balles traçantes
Devant les cils des yeux palestiniens qui brûlent en pleurant

Les directives sont issues du commandement replié dans la tente
Dressée sur les hauteurs des arrière-gardes du campement
Pendant que la chair à canon nettoie le cobalt de ses bottes
En ruminant des airs d’Ella Fitzgerald donnant du cœur à l’ouvrage
De la Soul à l’instruction en passant sous le viseur du feu ennemi

L’entraînement dans la salle d’armes où les escrimes sont capitonnées
Ne suffit pas pour dégoupiller la grenade avec les rameaux du fruit
Les pépins encombrent la route militaire où les décorations affleurent
Naissant dans le sang des morts kakis sous le reflet d’étain d’une breloque
Faite avec le plastic du C-4 récupéré dans l’armurerie où les sabres font le rang

Les tirs d’infanterie sont des piqûres de moustiques sur les blindés adverses
Qui rigolent en ayant le hoquet d’une salve d’artillerie à vingt-cinq millimètres
Poussant la toux grasse de quelques roquettes qui glairent sur les peaux déconfites
Le cœur à l’ouvrage et les genoux ouverts sur le champ de bataille céleste
Où se rencontrent Horatio Nelson et Spartacus qui conduit la révolte du Bounty

Une salve de tir à balles réelles puis les fantômes à blanc qui trompent les cibles
La sonnette d’alarme est tirée dans le mess qui croit encore à l’exercice d’alerte
Alors que plongent dans la baie les porte-avions sous la chape déjà rougeoyante
Qui missile le bruit même d’un lever du jour ensanglanté par l’aurore
De chaque côté de la coque qui chavire en perdant son tirant d’eau

Traction-brabant 105

Pour être modernes, les poètes contemporains emploient  des phrases simples qu'ils répètent dans tous les sens. Les phrases simples répé...