Thursday, October 03, 2013

De Johannes Gunzonic (extrait de T-B 70)


Il y a ce chien, le soir, qui fait savoir à tout le quartier qu’on le torture.


Il y a ces chats, la nuit, qui s’arrachent les yeux par amour (pas toujours).


Et début septembre, la foudre est tombée sur l’orphelin du premier rang – muet depuis ; et hier, une naissance heureuse.


Et la semaine dernière, au bout d’une très longue agonie, la mort de cette jeune femme silencieuse : ta sœur.


Et maintenant il y a ce gosse, cet adorable sale gosse, cette boucle brune sur mon épaule, qui préfère traîner et picoler que d’aller à l’école.


Et maintenant il pleut.


On se ressemble comme deux gouttes d'eau. Il a renié sa famille. J'avais fait la même chose à son âge.


Ses tibias sont couverts de plaies. Grosses mains d'homme déjà de paysan-mécanicien. Ongles noirs rongés jusqu’au sang. Il me regarde sortir du collège et traverser la rue de ses grands yeux bleus battus – longs cils, un peu d’acné sur sa face de veau kamikaze. Air craintif, très doux. Une taille de mi-lourd, à quatorze ans.


Son pouvoir de destruction, qu’en fera-t-il ? Avec son scooter installé en plein milieu du carrefour, quelle route choisira-t-il ? Contre quel mur blindé son fleuve personnel ira-t-il se jeter ?... – Pour le moment, casque rouge de « chevalier » à la main, short long, blouson Suzuki, Kévin attend sa dulcinée. Il fume un pétard, tranquille, sous la pluie.

1 comment:

Armel-Camille said...

http://armel-camille.blogspot.fr/

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