Friday, March 16, 2018

Incipits finissants (84)


Désolé, mais je commence à en avoir marre d’entendre que l’on ne sait pas ce que c’est que la poésie. Ce principe d’incertitude, bien dans le style de l’époque, est devenu une certitude qui permet à celles et ceux qui s‘en prévalent d’écrire tout ce qui leur passe par la tête. C’est pourtant un casse-tête mille fois plus facile à résoudre que celui du chômage.
Surtout que bien sûr, on sait ce que c’est que la poésie. C’est même marqué dans le dico : "La poésie est un genre littéraire très ancien, aux formes variées, écrites généralement en vers mais qui admettent aussi la prose, et qui privilégient l'expressivité de la forme, les mots disant plus qu'eux-mêmes par leur choix (sens et sonorités) et leur agencement (rythmes, métrique, figures de style)" 
D’emblée, la poésie est musique, cette dernière étant rendue par les rimes (du Moyen-âge à Baudelaire), les assonances et le rythme également. Par ailleurs, la typographie, la position des mots sur la page, les coupes aléatoires, entre ou dans les mots, contribuent à mettre du rythme à ce qui peut en avoir déjà.
Et puis, bien sûr, la poésie est image, celle qui se voit et celle qui s’imagine. Là, je fais plus particulièrement référence aux textes surréalistes.
Enfin, la poésie est affaire de situation. Car il y a des situations qui sont en général ressenties comme étant plus poétiques que d’autres : la venue du printemps, la naissance d’un enfant. Ici, je pense à la poésie du quotidien où l’observation de détails de la vie ordinaire donne lieu à l’expression d’une situation poétique.
Donc, c’est pas compliqué de définir la poésie. Et vous pouvez pas dire que ma définition manque de largeur d’esprit. Vous mélangez musique, images et situation, quelle que soit la forme employée pour le dire (vers ou prose) et alors, votre taux de poésie grimpe en flèche. Bien sûr, ce dernier varie en fonction de l’équilibre atteint entre différents dosages de musiques, images et situations.
À l’inverse, si vous découpez en vers le discours d’un homme politique, votre texte risque fort de ne pas être un poème, ce qui n’est pas grave en soi. Après tout, même en France, il n’y a pas de loi qui oblige (encore) à écrire de la poésie. Du moment que c’est bien fichu, vous pouvez appeler ça comme vous voulez : fragments, aphorismes, texte court, brève, roman. On s’en fout.
Mais pitié, arrêtez de vouloir faire rentrer la poésie dans toute expression écrite. La poésie attend juste qu’on l’aide à naître, pas qu’on la présuppose.
P.M.

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