Wednesday, February 07, 2024

De Lucie Roger (extrait de T-B 103)

En cavale immobile
 
Les feuilles d’automne lourdes des souvenirs
de l’été, mais aussi du temps
Lointains, enfouis aux racines de ma mémoire
Tournent au vent, tournent et tombent
Sans être emportées. Ces souvenirs
Aussi nombreux que vous êtes en moi,
drus, ne me quittent pas
Et je cherche
En un instant somnolent
la fuite.
En cavale immobile
Je m’évade…
 
Vieilles, séchées les feuilles perdent
au sol leur substance, leur chair
Mais gardent infiniment squelette
délicat, dentelle végétale
ajourée pour laisser place
Aux douleurs passées
Prenant vie à nouveau
Dans les interstices et les vides
des cadavres de cicatrices
tombées. Que je croyais
disparues.
Réminiscence.
En vain, la fuite,
En vain ma fuite.
Cette cavale immobile
d’instants lacuneux
Évasion illusoire….
 
L’eau ! Pluie, ruisseau, torrent
Que partent ces feuilles
Que me quittent enfin ces vestiges
Incommensurables.
Béantes plaies
Dérivez, flétrissures du temps !
Au-delà des meurtrissures intimes.
 

Pourquoi votre cours
Trouve sa source en mes yeux ?
Pourquoi votre lit
Sur mes joues s’est creusé ?
Pourquoi ici ce torrent vous emporte ?
Vous imprime,
Fossilisent ma peau
Des stigmates épreuves, malheurs, déchirures ?
Ma cavale immobile
Un instant impossible
Inutile cavale !
Ne se sème pas soi-même.
 

Grandes sont les peines
Que rien n’effacent
Quand aime le cœur !
Grandes sont les peines
Qui coulent dans les veines
Comme la sève jusqu’aux feuilles.
Futile la fuite,
La cavale de soi toujours immobile
Insoluble, inextricable,
Vertigineuse. Et chaque automne
 
Mortes pourtant elles tombent.
Comme autant de souvenirs
autant de souffrances
Indélébiles
Aussi nombreux que vous êtes en moi,
Qui de cavales immobiles en fuites absurdes
Jamais ne me laissent paisible.

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