Thursday, August 25, 2011

Traction-brabant 11

Jeune étudiant en première année de chômage, j’étais trotskiste moi aussi. Les fils de notaire me montraient du doigt. C’était facile. Je ne m’habillais pas comme tout le monde. J’avais accroché une faucille dans mon dos et je collectionnais des pin’s de Che Guevara sur ma poitrine. Enfin, je portais des bottes de maréchal différent. Pour moi, être trotskiste, c’était ça. En plus, ça plaisait aux filles jusqu’à leur vingtième anniversaire. Quant aux bouquins, ils disaient tout et leur contraire. Ce qu’il fallait, c’était casser et tout casser. J’entrechoquais des ampoules, je fritais des interrupteurs, je chassais la lumière trop lumineuse. Hélas, à force de révisions, j’obtins tous mes diplômes. La dernière année, j’accrochais ma faucille au porte-marteau, ne pouvant sortir à reculons du bureau de l’examinateur.
L’important était de ne plus se faire remarquer pour que la révolution triomphât. FOMEC : Forme, Ombre, Mouvement, Éclat, Connerie. Mon doctorat en poche comme un morceau de bidoche, j’allais pouvoir travailler, malheureusement , et ainsi gagner ma vie, chouette.
Comme j’étais sérieux au boulot et sans que j’aie besoin de renier mes idéaux, le chef me remarqua. J’achetai aussitôt le manifeste des égaux, les écrits révolutionnaires d’Anarchasis, et les déclarations de Ravachol. Il fallait prendre de vitesse le communisme et tout faire sauter avec de la cruauté pour ceux qui nous dominent.
Zut ! Le chef me proposait à présent un poste d’assistant, quelque chose situé entre la crasse et le plafond de la Sixtine. Comme je dis merci, il me proposa de laisser au garage cet éternel sac à dos qui puantait la lutte asociale. Ce point devint l’objet d’une résistance insoupçonnée. Je fis passer en clandestinité mon sac à dos en sacoche à portable mais rien n’y fit.
Voilà où j’en étais hier.



P.M.

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C'est la fin de Traction-brabant

Tout est expliqué dans le document ci-après (cliquer sur l'image pour davantage de lisibilité) :