Comme la madeleine de Proust lui rappelait son enfance, les écrivains sont associés dans mon esprit à une bâche blanche, vêture d’apparence criminelle, qui en la circonstance, dérobe à la vue du passant les édiles qui sont invités à un marché du livre. C’est comme ça, j’y puis rien, c’est pas de ma faute si les écrivains sont maintenus à l’abri, au cas où le temps se gâterait.
D’un autre côté, c’est plus pratique comme ça. Ainsi, il devient plus facile d’éviter les zones écrivains, là où ils vivent l’espace d’un week-end.
De la même façon, le passant ordinaire peut s’abstraire des terrasses sur lesquelles les écrivains baillent, des restos où ils mangent, de l’air qu’ils respirent aussi, fatalement.
D’ailleurs, peuvent-ils respirer ailleurs que dans des zones réservées à leur effet ?
Faut dire qu’ils l’ont bien cherché à vouloir absolument vivre de leur plume. Vous voulez être des pros ? Eh bien, c’est fait. Vivez dans des zones commerciales !
Pourtant, Rimbaud a pas mal réussi dans le trafic d’armes, après en avoir fini avec l’écriture, il est vrai. Kafka, comme juriste chargé d’indemniser les victimes d’accidents du travail. Laude, comme journaliste puis comme clodo qui a déclaré peu de temps avant sa mort quelque chose du style : avant de vouloir vivre de votre écriture, commencez déjà par vous dégotter un vrai boulot. Il parlait d’expérience !
Moi, c’est marrant, si je pouvais, je voudrais faire tous les métiers, sauf un seul : celui d’écrivain. Enfin, imaginez un instant que les écrivains ne soient plus des écrivains :
il y aurait comme un strike des familles qui se produirait sous leur chapiteau et on les retrouverait éparpillés façon puzzle dans toute la ville.
Ils apprendraient mieux ce qu’est une usine en dehors des résidences d’écriture et leurs textes nous toucheraient alors peut-être davantage. D’ailleurs, il n’y a pas que les usines, il y a aussi les pharmacies et les autres magasins, les croissanteries, les salles de classe, les bureaux, des plus classiques de la fonction publique à ceux plus sournois, qui composent les cabinets ou les études, et même, même les cinémas.
Mais la vérité est que les écrivains ont besoin de cette partition tragique pour vendre leurs bouquins. Ils ont aussi besoin de tranquillité pour écrire leurs livres, même si ces derniers ignorent souvent la réalité. Ils préfèrent rester à l’écart que partager le sort commun. Ayant soif d’être préservés, ils s’adonnent au plus fort de leur engagement au corporatisme, comme tout français vulgaire.
PM
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