Saturday, September 20, 2008

Incipits finissants (50)

Je vais vous faire un aveu. J’ai peur de louper un numéro de Traction-brabant. C’est de la folie, non ?

Pourtant, à force d’aller à donf (les auteurs publiés s’en accoutument !) admettez une seconde que je saute un numéro, victime d’un malaise qui tourne en trou de mémoire, d’un disque dur qui explose, évacuant par la même occasion un brouillon mal fini. Quelques jours plus tard, au moment d’attribuer un chiffre au numéro en cours et dans la hâte de rattraper le temps perdu, alors que l’ensemble des textes est en ordre de bataille et figure dans un tout nouveau fichier, voilà t-il pas que j’hésite, que je tergiverse. Bien sûr, dans ma bibliothèque se trouvent les anciens exemplaires de Traction-brabant. Mais ils ne sont pas rangés dans l’ordre et véritable cauchemar, il m’en manque plusieurs parmi les derniers, semble t-il. Tant pis, comme il faut y aller, je me lance et donne vite fait un numéro à Traction-brabant qui, après impression, ne s’avère pas être l’exact. Car j’ai sauté l’unique numéro que j’aurais dû sortir. Vous me direz ce n’est pas grave, tu peux repartir en arrière, sauf que c’est contre nature. La chaîne est brisée. De toute façon, le séquençage de Traction-brabant n’a plus aucune signification depuis l’incident.

Or, comment pourrai-je encore continuer à numéroter chaque numéro de Traction-brabant ? Et si les futurs numéros de Traction-brabant sortent sans numéros, on va les confondre tous !

Les collaborateurs de Traction-brabant ne pourront plus dire j’étais dans tel ou tel numéro. Ils pourront aussi bien apparaître dans tous les numéros de Traction-brabant que dans aucun.

Reste la dernière solution. Faire amende honorable en n’essayant pas de rectifier l’erreur. Et donc ne jamais sortir le numéro manquant, tout simplement.

Oui, mais dans ce cas subsistera en moi l’illusion, voire le regret, de n’avoir pas achevé ni même commencé en temps et en heure le seul numéro de Traction-brabant qu’il aurait valu la peine de sortir, tandis que les numéros subséquents ne seront plus là que pour boucher un trou définitif.
Je vous le dis : les angoisses chiffrées, par leur débilité, sont les plus aptes à miner le cerveau des lyriques.

P.M.

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