Monday, September 14, 2020

Incipits finissants (51)

Connaissez-vous la géolocalisation ? C'est cette invention technique qui permet, grâce à l'existence d'un satellite projeté dans le ciel, d’être retrouvé n'importe où, que ce soit à New-York ou sous une carotte de glace épaisse de deux kilomètres.
C'est super parce que du coup, ces jeux à la con de l'école, les cache-cache et cie, ne servent plus à rien. Pas besoin de vous planquer derrière un arbre, les ptits loups, Big Brother, Dieu, c'est à dire vos parents, vous repèreront illico.
Il n'est d'ailleurs plus utile de partir en voyage. Vous n'avez que peu de chances de vous perdre, si vous êtes livrés avec un gsm, bien sûr. Et puis surtout, la géolocalisation peut vous sauver la vie, s’il vous arrive d’être coincés dans une fissure de feldspath ou kidnappés par de vilains communistes. Bon, des fois, vous pouvez être mort, mais ce n'est plus qu'un état transitoire, puisque votre corps sera rendu au gouvernement puis à votre famille, afin d’être incinéré.
Cependant, pour ma part, malgré toutes ces recommandations médiatiques et pratiques réalistes, la perspective d'être géolocalisé à tout instant, en toutes circonstances, y compris quand je pisse, ne m'enchante guère. Et dire, pourtant, que cela pourrait sauver mon intégrité physique ! …
Remarquez : dans ce rêve d'enfance, j’ai plutôt envie d'être paumé, pour savoir comment ça se passe mal. Et pis si possible, qu'on sache rien de mon identité. Ça me paraît être assez sympa, comme ambition. Vous me direz : tu confonds tes apparences physiques avec l'intérieur de ton cerveau.... Bof, de toute façon, si l’on parvient à me géolocaliser contre mon gré, il est probable que des bombes me sortiront de la tête, comme dans les bandes dessinées.
Vous le gardez pour vous, mais c'est pour ne pas être retrouvé que j’écris. Très con, je sais. Pourtant, il y a plein de trucs qui restent au fond de mes tiroirs. Et même nuls, ce sont toujours des secrets.
Bon, je vois bien que vous n'êtes pas convaincus. Pardonnez-moi mes erreurs. D'avoir eu l'audace de penser que le fait d’être perdu me servirait de rempart contre la folie ambiante.
Je suis complètement malade de vouloir rester à l'abri sous un chapeau d'amanite.
P.M.

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