Je n’ai pas envie de dresser un bilan
des 10 ans d’existence de
Traction-brabant. En effet, ce genre d’exercice provoque en moi
l’insatisfaction, car il fige les choses, comme si elles étaient terminées,
qu’elles n’avaient plus besoin d’être poursuivies. Je préférerais encore me
livrer à une évaluation continuelle, même si vous n’aimez pas trop ce mot, et
moi non plus d’ailleurs.
Car au fond, une revue, qu’est-ce que c’est ?
Sinon un flux d’écritures, dont la convergence mériterait de durer aussi
longtemps que l’espèce humaine capable de se remettre en cause.
Ainsi, l’existence d’une revue de poésie en
particulier n’est pas si importante, dans la mesure où de plus et très souvent,
les mêmes auteurs se retrouvent dans plusieurs publications à la fois.
Plus intéressante est sans doute l’observation du nombre de
poètes qui apparaissent puis disparaissent du paysage. Quel chemin leur vie
a-t-elle pu prendre, pour qu’ils s’en sortent, de la poésie ? Des fois,
pas souvent, je les envierais presque.
Je me dis : ils ont trouvé le Graal du bonheur. Pour
ces personnes, le monde est devenu une mécanique démontable qu’ils savent
remonter quand ils en ont envie.
Je rêve qu’il n’y a plus d’incompréhension de leur part,
celle-ci laissant toujours à l’écrivant ce soupçon d’existence d’autre chose à
expliciter sans relâche…
A part ça, bien sûr - mais cette remarque est
de nouveau plus prosaïque - je vous confirme qu’il en est des revues comme des
bistrots :
on y retrouve sans problème, de publications en
publications, les collecteurs d’ardoises, ces (h)auteurs qui font beaucoup les
malin(e)s mais ne lisent pas les autres. Sachez, si d’aventure vous appartenez
à ce club, qu’ils ne passent pas inaperçus. Ceux-ci, celles-là peuvent sortir
du circuit et retourner à leurs tiroirs bourrés d’éclats de génie. On n’ira pas
les chercher. L’erreur est de continuer, contre toute attente, à penser le
contraire.
En revanche et pour finir, je constate que,
durant ces dix ans, je n’aurai pas été beaucoup embêté par les institutions
littéraires ou artistiques officielles. De ce point de vue, c’est même une
réussite, voulue au départ et totale à l’arrivée, du 25/20 au minimum. Comme si
ces institutions n’étaient pas là pour encourager toute activité littéraire,
voire artistique, mais se consacraient uniquement à compter les vivants et surtout
les morts, qui sont forcément beaucoup moins pénibles.
P.M.
1 comment:
Jamais sans doute il n'y eut autant de gens pour écrire cette sorte de chose que personne ne lit. (Georges Mounin)
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