Monday, November 25, 2019

Incipits finissants (56)

S’il y a quelque chose qui commence quand ça finit et vice-versa, c’est bien de l’écriture qu’il s’agit, enfin, du moins, en ce qui me concerne.
En effet, j’écris toujours pour dégonfler une baudruche qui, sitôt vidée, gonfle de nouveau pour être derechef aplatie, piquée avec une aiguille, afin d’en chasser tout le pus.
Cette histoire ressemble beaucoup à celle de Sisyphe remontant son rocher du fond du trou.
Ainsi, pour moi – et c’est une évidence naturelle – l’écriture trouve sa justification dans le fait qu’un problème est à résoudre, une injustice à dénoncer, un danger à affronter. D’ailleurs, cela ne m’empêche pas de vivre à peu près normalement.
Mon boulot est celui d’un scientifique qui aurait perdu toutes ses équations et dont les recherches, au mieux, l’amènent vers une autre solution que celle espérée au départ.
Il va sans dire que je n’écris pas pour faire plaisir aux lecteurs, ou pour constater que tout va bien. Dans ce cas là, j’ai mieux à faire !
Bien sûr, les problèmes à résoudre sont insolubles et leurs solutions, douteuses et douloureuses. Les thèmes sont du style : Comment dire ce que les gens refusent d’avouer ? Comment décrire un état paroxystique, de violence ou de perte de repères totale ? Comment survivre à une séparation ? Par quelle organisation sociale remplacer la famille ? Comment se mettre à la place des autres ? Comment vivre deux vies différentes en même temps ? Comment lutter contre le temps qui passe et la solitude ? Comment entrer en contact avec un disparu ?
Ne vous étonnez donc pas de la noirceur de mes textes et de ceux que je cite en référence. En plus, ce que le désespoir cache habilement, c’est une volonté farouche de combattre des forces qui nous dépassent. Et par un renversement des perspectives qui peut paraître surprenant aux yeux des profanes, une œuvre, voire une vie tragiques, constituent justement une victoire tant que dure la vie, et même au delà, parce qu’il y a combat. Au contraire, une vie plutôt lisse signe l’échec, la gaieté qui la traverse provenant surtout d’une absence de résistance au courant.
Et pourtant, je suis d’accord aussi pour affirmer : « Heureux les simples d’esprit ».
Par contre, si l’on a un cerveau, vaut mieux qu’il serve à croiser le fer. Les vraies joies, provisoires, existent à ce prix.   P.M.

1 comment:

Egypt said...

thanks

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