Rien à faire. La poésie a décidemment beaucoup à voir avec les saisons. Il y a le printemps des Poètes, bien sûr ! Mais
il y a surtout les fins de trimestres. Les mois de mars, juin, septembre et
décembre, tant redoutés à cause des avalanches incessantes de poésies. À chaque
fois, c’est la même chose : si vous écrivez des poèmes, que vous en lisez
(je précise cette circonstance qui n’a rien d’une évidence) et que donc, vous
êtes abonné à plusieurs revues vous permettant d’en lire, vous recevez en une
semaine une tonne de publications. Et puis après, plus rien. Et pas davantage
avant. Pourquoi donc ?
Au-delà des possibles offres de réduction de frais
postaux, il y a tout simplement cette attraction terrestre, cet atavisme envers
les saisons, qui fait qu’en général, la poésie ne se réveille, dans les revues,
que selon la mode quatre saisons ou sinon, été hiver.
Ainsi, en fin de compte, il s’agit d’une discipline
très administrative, dans sa régularité de pendule, ce qui peut contribuer à
l’ennui que parfois on lui trouve. C’est comme si rien ne pouvait atteindre
cette régularité parfaite. Ni évènement grave, ni traumatisme collectif. L’idée
s’enracine selon laquelle la poésie tourne à vide, puisque rien ne l’atteint,
alors qu’elle est censée traduire l’émotion même, sujette à d’irrégulières
explosions aux périodicités, par essence, imprévisibles.
Les revues, me direz-vous, sont justement là pour
canaliser, à travers un collectif stable (le collectif du revuiste, qui se tape
en général presque tout seul le boulot !), ces explosions individuelles.
Il n’empêche : la régularité poétique finit
par me porter sur le système, je l’avoue. Et je pense à nouveau à cette époque
où, avec quelques copains, nous rêvions d’allumer un barbecue le 31 décembre,
ou de dresser un sapin de Noël pour la Saint-Jean.
Heureusement, ce que la routine inhumaine, car
trop humaine, ne parvient pas à obtenir, peut-être l’absence de saisons
marquées l’autorisera-t-elle. Et la poésie suivra alors ce changement
universel.
Au moins, avec « Traction-brabant », malgré
l’apparence, je fais plus attention à mon rythme personnel, voire intérieur,
qu’à une respiration trimestrielle.
Si je suis déjà parvenu à sortir un numéro de Traction-brabant en dehors des mois de mars, juin, septembre ou décembre, sans doute recevrez-vous un jour (merci d’avance à la Poste qui m’aidera sur ce coup-là), un de ces numéros un 31 décembre, voire un 2 janvier ou un 14 août. Ce serait l’idéal de voir nos textes surgir quand on ne les attend pas. Cela s’appelle effet de surprise… qui devrait aller de soi en poésie.
P.M.
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