Friday, November 04, 2016

Traction-brabant 93

Je suis toujours surpris par l'absence de variété de maints recueils publiés par nombre de poètes pourtant beaucoup édités. C’est marrant ça, on dirait qu’ils le font tous exprès, les poètes, d’écrire tout le temps la même chose, et les éditeurs, de tout le temps les publier.

Alors, attention, je n’ai pas dit que ce n’est pas bien, ce qu’ils écrivent. J’ai dit que c’est toujours pareil et que personne n’a l’air de s’en rendre compte, alors que ça se voit comme le nez au milieu de la figure. Alors, pourquoi ?

C’est comme si on leur avait appris à se cloner pendant des années (parfois pendant un demi-siècle au bas mot), comme s’ils marchaient continuellement main dans la main avec leurs éditeurs, que c’était plus poli, en quelque sorte, de jamais déranger leurs habitudes.

On a donc l’impression, en lisant leurs livres, que ces poètes donnent à publier à leur partenaire tout ce qu’ils sont écrit dans leur calepin, dès qu’ils ont assez d’écritures pour composer un volume. Et quand on lit leurs recueils successivement, on se persuade que le passage de la main à la main s’est fait presque au milieu d’une phrase. Ce qui est gênant, c’est que, à côté de ça, si j’envoie un manuscrit à ces mêmes éditeurs, leur réaction n’est plus du tout identique. Elle se fait beaucoup plus châtiée. En effet, soit, c’est pas assez cru, soit c’est trop cuit, et l’amendement n’est pas permis, tandis que là, à peine démoulé du calepin, c’est déjà édité.

Donc, il faut croire que je n’ai pas tout compris. Moi qui pensais qu’il fallait faire des efforts en changeant de disque, qu’il était préférable de varier les plaisirs, à la fois pour le poète et ses lecteurs, eh bien, je me fourrais le doigt dans l’œil !

Et donc, vu que j’ai rien compris, j’ai préféré écrire sur des thèmes variés, tels que le métro, la vie en banlieue, la fête foraine, le mariage, la mort d’un ami, la course à pied, une actrice, et même, même la bagnole…Vade retro satanas ! Eh bien, j’aurais dû ne parler que de moi-même, enfin, de mes états d’âme, sans chercher des prétextes à la con ! En favorisant le sujet par rapport au style, le fond sur la forme, je n’ai pas été assez un puriste. Péché mortel ! J’ai voulu me changer les idées en faisant appel à l’imagination, alors que l’ennui n’existe jamais en poésie !

Mais promis juré. La leçon est comprise. À présent, comme n'importe quel poète d'expérience, je tiendrai mon journal au jour le jour, en alignant les crottes de bique du quotidien, à savoir à quelle heure les poubelles sont levées ou quand le voisin fait pisser son chien, sans oublier de vous détailler mes problèmes de tuyauterie, qui, forcément, iront en s'amplifiant Et là, ça marchera du tonnerre. Suffit juste de l'écrire en vers.

P.M.

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