Monday, December 13, 2021

Incipits finissants (100)

 
SANS la poésie, que serais-je devenu ? Il me faut reconnaître aujourd’hui que cette vieille dame un peu ridicule, dont la plupart se détournent, m’a servi de principal accélérateur vital.

SANS la poésie, puis-je imaginer un semblant de vie ? Oui, dans la mesure où j’évite d’en parler autour de moi, mais pas de l’écrire et de l’imaginer… encore plus belle qu’elle ne l’est.

SANS la poésie, les choses autour de moi (mammifères humains, circonstances et évènements) perdraient de leur profondeur. Je les trouverais trop vulgaires et perdrais l’envie de les aimer ou de les contester.

SANS la poésie, à quoi pourrais-je me raccrocher, qui ne serait pas une vérité immédiate ? Aux étoiles, à la nature trop verte peut-être, qui lui appartiennent déjà.

SANS la poésie, je devrais remonter très loin en arrière dans mon existence pour dénicher une béquille à ma vie intérieure.

SANS la poésie, j’apprendrai à respirer comme tout le monde. Métro boulot dodo, en y ajoutant les vacances qui appartiennent au même cycle. Alors que la poésie, c’est tous les jours de l’année, comme une permanence téléphonique jamais aux ordres ni aux secours.

SANS la poésie, les jours fériés deviendraient des jours fériés comme les jours de travail deviendraient des jours de travail.

SANS la poésie, tout devrait s’expliquer au quart de tour. Comment voulez-vous nous faire croire de tels bobards, les adultes ?

SANS la poésie, ayant fini par oublier de quoi il s’agit, je ne pourrais que constater son absence.

SANS la poésie, je ne retournerais pas à l’école pour y apprendre des récitations.

SANS la poésie, je n’aurais jamais le courage de découvrir de nouvelles absences de règles pour la remplacer.

SANS la poésie, l’adolescence serait terminée depuis des années.

SANS la poésie, je me serais beaucoup plus ennuyé chaque jour, et j’aurais été obligé d’imiter la plupart des gens.

SANS la poésie, le quotidien finirait par donner raison à la majorité.

1 comment:

Anonymous said...

Un hommage puissant à la poésie dans une revue non subventionnée qui, outre ce texte de son "patron" Patrice, diffuse les AUTRES.

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