Le lieu d'écriture est une question éminemment romantique qui revêt beaucoup
d'importance pour celles et ceux... qui n'écrivent pas ! Comme si le lieu
devait refléter le caractère extra-ordinaire de ce qui est écrit, s'agissant de
fictions (romanesques ou poétiques) : textes constitués de raison, mais
surtout d'inventions auxquelles il paraît logique que corresponde un lieu de
rêve : paysage de montagne ou de mer, forestier, haut-lieu historique,
etc.
Bien entendu, chaque
scribouilleur a ses petites manies qui lui permettent d'élire un endroit de
prédilection pour y exercer son art.
Ainsi, les exemples sont
légion d'écrivains ne pouvant écrire que dans des cafés (le dernier en date, à
ma connaissance, est Ismail Kadaré). Cela paraît contradictoire en apparence,
car il y fait du bruit, ce qui devrait gêner la concentration. En même temps,
ce choix est porteur : on peut parler dans un café. C'est un lieu de vie
que l'écrivain capte dans ses textes.
Mais il n'y a pas que les
cafés pour inspirer. Je suis aux regrets de vous annoncer que n'importe quel
endroit convient, pour peu que l'on ait envie de s'y mettre. Patatras ! Le
romantisme de l'inspiration en prend un bon coup dans l'aile. Il n'y a pas de
légende, pas de truc.
Écrire, c'est n'importe où,
même dans les endroits moches comme c'est pas permis. Et pourquoi ? Parce
que l'on n'écrit que ce que l'on a dans sa tête, qui n'a souvent aucun rapport
avec ce qui se passe à l'extérieur.
Vous voulez des
confidences ? Les poèmes de « Faux partir », je les ai composés
dans un appartement situé en plein centre-ville de banlieue, au-dessus des feux
qui bordent la Nationale 3 à Livry-Gargan (Seine Saint-Denis). Un endroit
plutôt bruyant. Il est vrai que l'ambiance de « Faux partir » tire
sur le cauchemar. Quant aux proses que j'ai écrites sur la course à pied (qui
se déroulent dans des lieux de nature), il en est à peu près de même. C'était
toujours face à un mur, avec comme seule courte vue, le tronçon de la cheminée
d'une tuilerie à Nancy. Rien à voir avec la plupart des endroits bucoliques
décrits, situés à des kilomètres de là.
Plus que d'espace, j'ai
besoin de temps pour me détacher des paysages dont il est question dans mes
textes. Peut-être qu'un jour, face à un panorama de rêve, je serais tenté de
délirer sur une cheminée d'usine.
L'esprit de contradiction
encore et toujours, c'est ça et rien d'autre qui est important pour
l'écriture !
P.M.
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