De Régis Belloeil (extrait de T-B 25)

Un soir de pluie

A Ginka Trifonova

1999
Rue de la clôture
Epilogue

Envie d’un ailleurs
D’un ailleurs meilleur
La vie ne suffit pas
A ceux qui l’aiment
Vraiment

Petite fille née en Bulgarie
Puis
Jeune corps mort
Un soir de pluie

Le tox tue la pute
La misère tue la misère
La misère tue

Ton visage
Perdu dans le noir
Devenir qui ?
Devenir quoi ?
Devenir gris
Comme la mort

Toute seule dans le noir
Attendant
Ce qui n’existe pas

Souviens-toi
Petite
De tes rêves envolés
Pourquoi cette ruelle
Un soir de pluie

Pourquoi vouloir
Devenir
Ce que tu n’es pas

Cadavre de ton autre vie
Celle que tu aurais eue si…

Fuir
Fuir quelqu’un ?
Quelque chose ?
Fuir soi-même

Un soir de pluie
Un soir où j’aurais pu
Si…

L’enfer est dans les veines
Est dans la vie

L’alcool, sang du lâche
Coule dans les veines du monde

Ginka gît
Sur un matelas
Usagé

Etre humain ou bien chien ?
Maltraité sur
Bitume insalubre

L’horreur est humaine
Bien plus que l’erreur
Ventre encore chaud
Rigor mortis
De cadavre raidi

Rêves avortés
Enfant abandonné
Non vie sur planète impropre

Sens la pluie sur ton visage
Pure et lisse
Tout ce que la vie
Ne peut être

Douleur de
Devenir gris

Crever au milieu des capotes
Merde au milieu des
Merdes

Rien ne te fut épargné
Même le sang fut
Versé

Village déserté
Espoir
Jamais abandonné
Et pourtant
Horreur
Non dissimulée
Sans nom
Hurlée

Dans tes yeux crevés
S’éteignent les étoiles
Des flocons noirs tombent
Sur le trottoir

Deux yeux fixes et froids
Ceux de celui
Qui va te tuer

Cette pluie sur tes bras
Est la dernière chose que tu
Ressentiras

Tes yeux se ferment
Sur ce monde endormi
Que tu ne regretteras
Pas