Friday, March 15, 2013

Traction-brabant 63

Ces derniers jours, je suis retourné lire les fondamentaux, à savoir les poèmes d’Arthur Rimbaud qui m’ont ouvert les yeux sur la poésie et sur le reste, il y a longtemps déjà.
Eh bien, je dois reconnaître que la claque reçue est encore intacte, bien que je n'aime pas forcément les mêmes textes qu'à dix sept ans. A "Une saison en enfer", je préfère aujourd'hui, par exemple, les "Illuminations", un continent à elles seules.
Car les poèmes de Rimbaud, ce n'est pas que de l'écriture, c'est une promesse d'élargissement des possibles (voyages, aventures, apprentissage des langues et des sciences exactes), ainsi que de libération des pesanteurs ancestrales (religion chrétienne famille).
Hélas, un siècle et demi après cet avènement d'une modernité (in)humaine, l'apport de Rimbaud ne me semble toujours pas digéré.
En effet, combien de gratte-papier sommes-nous à croire que nous allons accéder à notre petit part de reconnaissance, sans avoir besoin de faire autre chose que d'écrire ? Mais ce n'est pas le plus écœurant à mon sens, car, après tout, chacun fait ce qu'il peut. Le pire, c'est quand un auteur confirmé se réclame de l'oeuvre de Rimbaud pour pondre une incompréhensible usine à gaz littéraire subventionnée (livre, expo). Là, on ne peut pas être plus à côté de la plaque, de ce qui semblerait être, en tout cas, une tentative de transmutation par la poésie.
En effet, l'horizon indépassable du poète, serait-ce de ne parvenir qu'à être un professionnel de l'écriture ? Un peu court du museau, non ? D'autant plus que si la poésie nous aidait à nous dépasser pour devenir quelqu'un d'autre, on ne serait pas pour autant obligés de devenir trafiquant d'armes. Ainsi, à l'heure actuelle, n'importe quel bénévole à ses heurs perdues, me semble meilleur poète que ces théoriciens fossoyeurs professionnels parasites qui dégoûteraient de la création artistique une armée de zombies, mais, qui, contre toute attente, donnent à la poésie sa visibilité minimale aux yeux des institutions culturelles. 
Donc, en résumé, Rimbaud a eu raison de se barrer du monde littéraire, après son engagement de cinq ans, pour aller vivre quelque chose de plus concret. Et je ne peux m'empêcher de compter le retard intersidéral qui nous sépare de cette réalité là.
La distance est tellement considérable qu'il me semble que nous soyons tombés dans un trou noir qui nous fait pédaler dans la choucroute.
Mais peut-être suis-je allé trop loin dans mes propos, car la plupart des auteurs dont l'impression de s'y sentir bien, dans l'écriture. Comme les anciens copains du poète qui, dans leur petit Paris, continuaient de rêver à son retour...
P.M.

1 comment:

Laurent Bouisset said...

Heureusement, loin du CIPM, il y a des trucs comme ça que je t'envoie :

https://www.youtube.com/watch?v=1oI5XlZiSV4

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